[Présentation] Une histoire de famille

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[Présentation] Une histoire de famille

Message par Ajax » 17 Déc 2011, 01:26

Bonjour,

Voici un petit récit de partie pour me présenter. Je n’attends donc pas un retour particulier sur la partie présentée, mais tout commentaire et toute question sont les bienvenues.

Je fais du jdr depuis le milieu des années 80, où j’ai commencé avec la boite de base de D&D, directement en tant que MJ et n’ai depuis jamais vraiment cessé de jouer (mais plus à D&D depuis fort longtemps). Il y eu, bien entendu, des périodes riches et des périodes creuses, que ce soit en fréquence ou en intensité.

Aujourd’hui et depuis quelques années, je joue essentiellement avec le même groupe central d’amis, auquel vient se greffer d’autres joueurs, qui sont toujours les bienvenus (au moins pour un essai). Pour le moment je participe à trois tables de jeu : en tant que joueur à une table med-fan (univers et système maison) et dans une campagne Néphilim (2e éd., Chroniques de l’Apocalypse) ; en tant que meneur à une table med-fan (même univers et système que l’autre table où je suis joueur). Je pense bientôt démarrer une nouvelle table med-fan, c’est d’ailleurs la raison de ma venue - nous en reparlerons une autre fois. Globalement je m’amuse bien, bien mieux qu’il y a quelques années ou j’ai franchi une période très creuse.

Le souvenir que je vais retracer céans vient de la première table citée, une table médiévale fantastique, et date d’avant cette période creuse. Le jeu est centré autour d’une ville, mélange de quêtes “obligatoires”, facultatives, intérêt personnel des joueurs/personnages et bac à sable.

L’explication est longue et je me doute que, malgré mes meilleurs efforts, l’anecdote sera sans doute peu intéressante pour vous. Mais il s’agit là d’un de mes meilleurs souvenirs de jeu de rôle, c’est pour cela que je l’ai choisi.

Les noms des protagonistes, tant joueurs que personnages, ont été changés pour faciliter la compréhension : les noms des joueurs et de leur personnages respectifs commencent par la même lettre.

Moi, Ajax, j’y joue Anardil, prêtre elfe et voleur, très altruiste et préoccupé par le bien-être du royaume. Il est issu d’une famille nombreuse et assez soudée.

Des trois à cinq autres joueurs / personnages qui étaient présents lors des séances - l’organisation de la table étant assez lâche à ce moment -, une seule est réellement pertinente et je vous la présenterai plus tard. Les autres n’ont pas d’importance pour cette anecdote. Ils resteront anonymes.

Un PNJ, au contraire, joua un rôle focal. Le meneur, Manu, jouait (entre autres) Malek, mage surpuissant. Anardil avait rencontré Malek lors d’une de ses toutes premières aventures (jouées). Malek avait voulu embrigader de force Anardil et quelques autres jeunes prometteurs dans ses servants, sous menace indirecte mais très réelle de mort. Anardil s’en était sorti et avait sauvé les autres d’une forme de servitude (en vérité, Manu n’avait pas vraiment prévu qu’à ce stade les PJ puissent s’en sortir avec leur libre arbitre entier), et garda naturellement rancune envers le mage. Malek considéra depuis Anardil avec un fort mépris apparent, mais trouvait son appréciation de la valeur du jeune prêtre confirmée. Il parvint régulièrement à forcer la main de celui-ci pour lui confier des tâches (ou - plus rarement - à lui apporter un support non désiré mais bien utile), par la tromperie, par le chantage, par la menace et par la manipulation. Bien qu’influent, Malek vaillait farouchement à rester dans l’ombre, et leurs tractations restent entièrement clandestines. Le goût du mage pour les apparences illusoires et les sort d’oubli ne facilitaient pas les choses à Anardil.

Le temps passe et “le groupe” auquel Anardil appartenait originellement fini par se disloquer. De nouveaux joueurs, de nouveaux personnages arrivent. L’organisation de la table étant, comme vous le savez déjà, assez lâche à ce moment, deux groupes de joueurs y jouaient simultanément, un groupe environ un week-end sur deux, l’autre la semaine, et certains plus disponibles, dont j’étais, faisaient l’aller-et-retour, de manière occasionnelle ou régulière avec un même personnage ou un autre pour l’occasion. Ajoutez à cela quelques solos occasionnels...

Voici le moment d’introduire le dernier protagoniste. Barbara, privée de son personnage habituel car il est mobilisé dans des actions simultanées dans la fiction mais engagées précédemment à l’autre table, se cherche un nouveau personnage. Après discussion, elle se retrouve à jouer un personnage déjà présent dans le monde : la sœur aînée d’Anardil, au départ “rien que pour quelques parties”. Barbara joue donc Barberine, bardesse talentueuse et effacée (jusque là.…).

Quant à moi, pour les mêmes raisons que Barbara, je me retrouve également à jouer un autre personnage, qui n’aura ici qu’un rôle de figurant.

Rencontres, coïncidences, intersection des histoires personnelles des personnages, et voici que se forge un nouveau groupe. Pas de héros, ni d’aventuriers adédéesques, mais un groupe de personnalités.

Je me vois forcé d’arrêter de jouer quelques séances et, comme d’habitude, le jeu se poursuit avec les joueurs présents. Je reste en contact avec Manu et lui indique dans les grandes lignes ce que fait mon second personnage durant ce temps, le gardant impliqué dans les développements du monde mais éloigné des autres protagoniste.

Lorsque je reviens à la table, il est temps de revenir à Anardil : les huits joueurs nécessaires peuvent enfin être réunis pour poursuivre un des rares “donjon” de la campagne : l’exploration d’une antique nécropole (et, non, nous n’y avons pas rencontré de morts vivants). Anardil est “libéré”, il peut donc revenir. Pas très joyeux, car il vient de perdre, juste après l’avoir enfin retrouvé, son frère aîné disparu depuis des années.

De retour chez lui, Anardil apprend naturellement tout ce qui est arrivé entretemps à sa soeur Barberine et s’en inquiète. Il veut la retrouver, mais elle est partie en voyage. Il se renseigne auprès de ses nouveaux compagnons, qui sont plutôt méfiants envers ce petit frère intrusif. I fini par apprendre (et moi aussi) entre autres choses que sa soeur est maintenant quasi fiancée avec un elfe, inconnu de lui, mais bien mis de sa personne et que c’est d’ailleurs avec lui qu’elle est partie. Du coin de l’oeil, je m’aperçois que Manu, le meneur, a l’air un peu embêté... et puis nous continuons sur d’autres choses.

Deux séances après, Anardil rentre chez lui pour trouver une missive de sa soeur, qui l’invite à une soirée qu’elle organise. L’adresse n’est celle de Barberine, mais celle d’une maison parmi les plus huppées de la ville. Il ne parvient pas à croiser sa soeur auparavant et, le jour dit, se rend à la soirée, fort en retard bien malgré lui.

Il arrive pendant le repas. Sa soeur lui présente son futur fiancé et l’installe à ses côté à la table d’honneur... quelque chose cloche. Et puis, en un instant, sur une description apparemment anodine qui cachait un faible indice, le déclic. Le fiancé est le détesté Malek, sous sa véritable apparence. La surprise, le choc, … les soupçons… Anardil sait. Malek sait qu’il sait. Les salutations sont glaciales. Tout le monde est surpris, personne (personnage et joueurs) ne comprend ce qu’il se passe. La conversation qui était gaie et facile se fige autour des futurs beaux frères, qui s’adressent des propos venimeux. Barberine, blessée, finira par fuir sa propre soirée, les larmes courantes.

Mais ils sont vraiment amoureux. Barberine est sincère, et furieuse que son frère et son futur fiancé gâchent ainsi cette importante soirée.

Sur ces scènes de fête qui s'effondre, le jeu d'acteur fut impeccable, l’immersion profonde et les sentiments violents. Nos personnages ont pris vie et il nous a semblé qu’ils décidaient eux-mêmes de leurs actions.

Seul Manu connaissait les tenants et aboutissants d’une coïncidence orchestrée accidentellement par les joueurs eux-mêmes, autour du meneur et à sa grande surprise. Aucun autre personnage, ni aucun autre joueur, ne connaissait Malek, qui n’avait plus fait d’apparition depuis quelques temps. Le premier jour d’absence d’Anardil, il était présent comme élément de décor et d’ambiance dans l’auberge où Barberine animait la soirée. C’est Barbara qui a décidé que Barberine s’y intéressait, qui a orienté le jeu vers une séduction mutuelle, en toute méconnaissance de cause.

Cela reste un de mes meilleurs souvenirs de jeu de rôle. Il est un peu frustrant de le devoir autant à la chance, mais je ne crois pas que nous aurions pu sciemment construire cette situation et y être aussi impliqué. Je pense aussi qu’une bonne part de la qualité de cette séance venait simplement du fait que nous étions tous, joueurs, en forme, sans soucis, dans le bon état d’esprit. Cela, malheureusement, ne se contrôle pas facilement.

A ceux qui auront eu le courage de tout lire : merci de votre patience, j’espère que vous y aurez trouvé quelque chose.

Ajax

[edit] PS : mon "vrai" prénom est Philippe. Mais par compassion pour les lecteurs de passage, je préfère que l'on utilise mon pseudo dans les discussions.
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Schultz (Jérôme S.) » 17 Déc 2011, 14:12

Bienvenue Philippe, merci de ce récit que j'ai bien apprécié pour ma part.
C'est un peu chaotique parfois, ça me rappelle vraiment mon expérience sur DD3.5 ou je gérais les situations de la même façon que votre meneur(partie même s'il y a des absents, jeu de chaises musicales entre les personnages quand un joueur occupe son personnage ailleurs ou autre, joueurs relativement nombreux dans la campagne mais rarement tous présents, groupes qui se disloquent, etc...).
J'aime bien ton anecdote. C'est le genre de choses que j'aime jouer en JDR. Par curiosité, j'ai envie de demander si vous avez continué à exploiter cette relation et ces PNJ de Malek et Barberine par la suite. Qu'est ce que cette histoire est devenue dans la fiction ?
Schultz (Jérôme S.)
 
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Ajax » 18 Déc 2011, 11:54

Merci :)

Ce type de maîtrise demandait de jongler pas mal, avec des adaptations en cours de route pour modifier certains éléments de la fiction a posteriori, un peu comme les opérations de retcon des comics. C'était à la fois une grande richesse et contraignant. Notre groupe de joueur s'étant réduit autant que notre temps libre, nous ne pratiquons plus de cette manière, mais nous en gardons d'excellent souvenirs (dont une séance à 15-20 joueurs qui s'était excellemment passée).

L'histoire de Malek et Barberine fut bien entendu poursuivie. Au sein de la vie tumultueuse des personnages, ils se sont fiancés, puis mariés. Anardil a pu découvrir d'autres aspects de Malek, qui n'était pas l'elfe qu'il semblait être et sa colère s'est changée en compassion. Malek n'avait plus la volonté de vivre, Barberine l'a plusieurs fois sauvé et lui a redonné goût à la vie. (En tous cas le croit-elle jusqu'à présent.) Aujourd'hui, Barberine porte l'enfant de Malek et elle l'a poussé à s'attaquer à prendre le contrôle d'un royaume dont il serait l'empereur prophétisé.

Toutefois, Barbara ne joue plus avec nous. Cette table de jeu était devenue progressivement bancale, puis de plus en plus problématique. Manu s'est retrouvé épuisé en tant que meneur. Je suis devenu le meneur à cette table. Après un an d'efforts, j'étais certain que cela ne pouvait pas fonctionner ni s'améliorer et j'ai pris la décision ferme de l'arrêter. Manu et moi en fument marqués dans notre entrain et notre confiance en nous et nous traversâmes une période plutôt creuse et peu satisfaisante. Nombreux joueurs traversaient des changements importants dans leur vie (séparations et divorces (chaud quand les conjoints jouent à la même table), mariages, enfants, expatriation, licenciements, ...), ce qui compliquait singulièrement la reprise d'une vie ludique équilibrée. Et dans ce chaos, Barbara et quelques autres se sont éloignés de notre groupe. Il reste les bons souvenirs et l'expérience acquise au travers des mauvaises passes.

Bref, Barbara ne joue plus avec nous. Barberine poursuit dans les directions qu'elle a données. Certains personnages joués aujourd'hui sont sur des trajectoires qui devraient croiser les leur dans les mois (irl) qui viennent. Je suis impatient de voir comment ils vont réagir, car la situation devrait être interpellante :D

Bon dimanche,

Ajax
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Ajax » 18 Déc 2011, 14:44

Après avoir répondu, je me rends compte que toi aussi tu parles au passé de ce type de jeu... Qu'est ce qui a évolué, ou a dû évolué ?
Dernière édition par Ajax le 18 Déc 2011, 23:54, édité 1 fois.
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Florian » 18 Déc 2011, 18:20

Salut Phillippe,

Sympa la description de cette scène. En effet, je trouve aussi que les plus beaux moments de JdR sont quand des éléments au départ sans lien apparent s'interconnectent de façon plausible et naturelle. S'il y a un moyen de provoquer ça, je ne suis pas détenteur du secret. C'est simplement des choses qui arrivent de temps à autre.

Quand tu parles du jeu perso, vous l'avez publié quelque part sur Internet? Tu peux donner un peu plus d'infos?
L'ombre du passé: JdR épique
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Ajax » 19 Déc 2011, 01:00

Bonjour Florian,

Non, nous n'avons rien publié sur le jeu. Nous avons certainement des notes que nous partageons sur le net, mais rien de bien utile pour quelqu'un d'extérieur.

Le monde est parti d'un univers ADDéesque, nourri à la balade de Pern, que nous avons créé au fur et à mesure des parties, qui a changé autant qu'il s'est étoffé au fil des années. Il ne forme toutefois pas un cadre de campagne présentable, sauf à vouloir retracer les parcours des différents joueurs/personnages.

Le système de jeu... Nous avons d'abord animé le monde avec un mix ADD 2 / ADD un peu adapté, puis ADD 3, et puis ADD 3.5. Mais en fait, depuis longtemps, ADD n'était plus le moteur. Le principe réel (mais non formulé) était "Faisons nous confiance, et faisons confiance au meneur, pour être juste et nous emmener dans des directions intéressantes." Les règles de simulation ne servaient plus qu'à nourrir la fiction (par exemple ce qu'un mage peut ou ne peut pas faire, ... et encore), à résoudre rapidement les points finalement peu intéressant ou où l'incertitude était réelle. Nous n'avons quasiment jamais interrompu une partie pour vérifier une règle ou en discuter.

Et puis nous avons intégré un nouveau joueur, un chouette joueur, sympa, avec des bonnes idées, des personnages intéressants, ... mais qui n'abandonnait pas comme nous le système. Plan de carrière des personnages réalisés des niveaux à l'avance (alors qu'au même moment nous avions tendance à abandonner les xp, voire l'avancement des personnages), personnages optimisés, application stricte des règles, très bien connues, pour toutes les situations impliquant son personnage. Comme vous pouvez le deviner, cela posait quelques problèmes. Nous avons donc décider de créer un système qui correspondait plus à ce que nous voulions faire. Je m'en suis chargé. Cela a beaucoup amélioré la situation.

Système qui a connu environ 3 incarnations différentes, mais qui n'a pas grand chose de spécifique ou de remarquable. Dans sa première incarnation : une mécanique de résolution d'action simple au d20 (mais qui "explosait"), toujours en opposition, jet sur caractéristiques + compétence + modificateurs, quelques notions de points de vie, de fatigue, de lassitude et de santé mentale que l'on pouvait mettre en jeu pour gagner des bonus, et progression des personnages avec des XP assez faibles (3 à 5 par partie). Trop compliqué au niveau de la mécanique de résolution.

La dernière version n'est même pas complète, car notre pratique (pour ce jeu) s'est encore plus détachée des règles de simulation. (Ce qui existe ressemble à un Heroquest 2 au d12.) Souvent, nous jetons simplement un dé pour voir si c'est plutôt bon ou plutôt mauvais, sans nous référer à une feuille de perso. Les points de vie ? Des années que nous n'y avons plus réellement touché. XP ? même chose (toujours : pour ce jeu). Cela me ferait malgré tout plaisir de terminer ce système un jour, mais ce n'est plus une priorité. Le seul joueur pour qui cela avait une importance réelle et concrète a arrêté le jdr. Je crois pourtant qu'un système plus complet et achevé pourrait structurer un peu le jeu et éviter certaines dérives lors de nos moments les moins inspirés. Toutefois, si je suis actuellement convaincu que "system matters", Manu pense que "les dés ne servent qu'à faire du bruit derrière le paravent" (accessoire dont nous nous passons depuis longtemps pour ce jeu) et n'accroche pas aux systèmes de jeu qui ne sont pas de stricts systèmes de simulation. Cela ne simplifie pas la rencontre pour la conception. Mais peut-être pourrais-je un jour me ré-attaquer à ce système un jour ici ? J'aimerais bien le pérenniser quelque peu. Toutefois j'en ai un nouveau sur le feu qui me prends l'essentiel de mon attention. J'en parlerai bientôt dans la rubrique "Idées", c'est pour cela que je suis venu ^_^

Enfin bref, le cœur du système actuel réel tiens en deux phrases "faisons nous confiance, sinon on peut toujours en discuter" et "dans le doute, lance un dé".
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Florian » 19 Déc 2011, 23:10

J'aime le principe de "confiance", car dans n'importe quel jeu, c'est la base. Les règles les plus complexes ne peuvent empêcher les tricheurs/abuseurs. Donc autant en rester à l'essentiel!
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Frédéric » 20 Déc 2011, 01:55

Bonjour Ajax,
Excellent rapport de partie qui peut faire réfléchir quant à l'étendu des possibilités que peut offrir un jeu de rôle, fût-il destiné à favoriser des combats épiques dans des donjons.

Pour ma part, en y réfléchissant, je recense un certain nombre de moments de grâce durant mes campagnes (en tant que MJ ou en tant que joueur) jouées à partir de bouquins de JDR du commerce plus ou moins modifiés. Et le moins que je puisse dire, c'est qu'ils étaient rares et difficile à prévoir.
Aujourd'hui, plutôt que d'attendre qu'ils se produisent, je m'applique à concevoir mes jeux (et donc mes parties) de sorte qu'il les facilite.

De ce que j'en retire, les "règles de simulation" ne les facilitent pas, pire, elles peuvent parfois les entraver (en se focalisant sur des enjeux anecdotiques, par exemple) et le rapport du MJ aux joueurs et à la fiction explorée est essentiel (les joueurs aussi, bien sûr, mais la mainmise du MJ est souvent le meilleur moyen d'empêcher des moments comme celui que tu nous décris).
Je suis très curieux des projets que tu évoques, n'hésite pas à nous en parler.

Si tu as des questions à propos du fonctionnement du forum, tu peux les poser en ouvrant un sujet dans la rubrique "Méta" ou en envoyant un message privé à Christoph.
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Ajax » 20 Déc 2011, 11:16

@Florian : oui, la confiance est pour moi une nécessité primordiale, surtout pour cette orientation du jeu.

@Frédéric

Je pense que l'abandon des règles est la preuve de leur inadéquation et de la gène qu'elles induisent dans notre démarche ludique et créative. Une première question que je me pose est : peut-il y avoir des règles qui bâtissent sur notre confiance et nous emmènent plus loin ? Je pense/espère que oui. Et pour cela, il faut essayer. Par contre, j'observe que notre groupe de joueur, à force de l'habitude, a de plus en plus souvent des parties plaisantes et de moins en moins souvent des parties creuses ou lassantes. Dans ce dernier cas, la cause principale en est généralement la fatigue bien réelle des joueurs. Non pas une fatigue ludique, la simple mais parfois écrasante fatigue de la vie quotidienne.

Par contre je crains qu'à tenter de forcer par un système la fréquence des moments « significatifs », on ne risque de perdre les véritables surprises et l'engagement profond dans son personnage et réduire ainsi leur profondeur. Il y a là, au mieux, un équilibre à trouver.

Notre « non système » nous permet de changer régulièrement notre fusil d'épaule, de changer sans heurt la direction de notre jeu. Je crains que tout système un peu contraignant (et pourtant, de la contrainte nait la créativité) ne soit finalement effacé comme les précédents pour permettre cette liberté. De nouveau il faut essayer, et c'est ma ferme intention.
En plein questionnement, en pleine digestion, je décante.
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Christoph » 20 Déc 2011, 14:29

Bonjour à tous

Super rapport de partie, Ajax ! C'est une excellente façon de se faire une idée de tes expériences et préférences.

J'ai une question pour lever une confusion : le premier principe qui gouvernait vos parties était, selon toi, « faisons nous confiance, sinon on peut toujours en discuter ». Se faire confiance sur ou discuter de quoi ? Que veut dire exactement « dans le doute, lance un dé » ? (À première lecture ça peut faire penser qu'on lance un dé quand la confiance est mise en doute, mais ça ne doit pas être ça.) C'est quoi « être dans le doute », comment ça se reconnaît et qui décide quand on lance le dé ?

Fréd', Ajax a commencé par m'écrire un message privé pour savoir comment se présenter, d'où la naissance de ce fil, il sait donc qui je suis et a montré d'emblée un soucis de bien faire. Je préfère qu'on me laisse le soin de me présenter moi-même, et que on n'explique le fonctionnement du forum que si l'on pose la question et que manifestement je ne débarque pas après quelques jours (enfin, je dis ça à Frédéric, mais ça s'applique à tout le monde, d'où ma remarque en public).
Attention Fréd', tes dernières critiques des jeux et parties classiques ont donné lieu à un fil qui a nécessité une intervention modératrice, je te demande donc de privilégier une approche très concrète en posant des questions sur ce rapport et de répondre à des questions explicites, de mettre de côté ton expérience, ton engagement et tes préférences pour le moment. Ici Ajax nous explique son expérience, gardons ce fil pour ça.

Ajax, ce type de sujet est épineux, car il fait appel à beaucoup de souvenirs et d'expériences personnelles, plus ou moins bonnes, pour beaucoup d'intervenants. Essayons de ne pas tirer de généralités, et juste de parler de tes expériences. On parlera des pièges à éviter et la validité des systèmes qui tentent de provoquer un certain type d'expérience dans le fil pour le développement de ton jeu. N'hésite pas à lancer cette autre discussion dès que tu te sens prêt !
Christoph
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Ajax » 20 Déc 2011, 17:49

Merci Christoph. Je suis heureux de voir que cela te plait.

Nous voici donc partis dans l'analyse. Je tiens à signaler que c'est une analyse toute personnelle sur la manière dont notre groupe fonctionne dans le cadre de ce jeu. Peut-être les autres joueurs mettraient-ils l'accent sur d'autres choses ou l'exprimeraient-ils totalement différemment. Tout cela a évolué informellement. Mais moi j’aime bien analyser.

Faisons nous confiance

Laisser les autres, en particulier le meneur mais pas uniquement, emmener la partie dans des directions qui nous semblent incongrues. Ne pas bloquer de suite, mais laisser le temps et l'espace aux idées pour se développer. Ne pas demander immédiatement une explication, cela risquerait de gâcher une belle surprise.

Cette confiance porte à la fois sur la manière générale de jouer, sur les directions données dans la fiction, et aussi sur l’application ou non des règles de simulation. Un meneur de jeu qui tranche directement des actions (nous ne faisons pas vraiment encore dans le conflit), c’est courant chez nous. S’il s’agit d’une action relativement certaine (dans un sens ou dans l’autre). D’une action vraisemblable, incertaines, mais dont l’échec serait barbant (ou la réussite, d’ailleurs). Si les conséquences sont négligeables, indifférentes pour les histoires en cours.


Illustrations

Faire confiance au meneur — là j'ai le plaisir d'avoir sous le coude un exemple parfaitement outré. Lors de notre dernière partie (il y a 15 jours), de manière très incongrue, c'est Manu qui a joué _tous_ les personnages (PJ) pendant un tiers à la moitié de la partie. J'exagère un petit peu, mais nous l'avons laissé clairement piétiner le classique « les joueurs contrôlent leur personnage, c'est leur seul réel privilège, essayons que rien n'altère ce contrôle » (j'espère que je suis assez clair). Qui plus est, les personnages se retrouvaient dans un environnement très contrôlé, sur lequel ils ne pouvaient réellement agir, ou en tous cas pas de manière significative (plaine à l'infini sans réel point de repère à part un cours d'eau central, monde inconnu, juste de la végétation et des animaux, la plupart des obstacles infranchissables, …). Et le tout sur un « simple caprice », il n'y avait pas moyen pour les personnages d'éviter cette situation. Bref, une description qui ressemble au pire du pire du railroading. Et pourtant, la partie était très chouette, nous nous sommes bien amusés. A certains moments, c'était plus du compte que du jdr… Mais pas tant que cela, car c'était également une mise en place, une exposition et des choses qui nous faisaient réagir. Qui faisaient réagir les joueurs, qui faisaient réagir les personnages de manière interne (et donc donnaient lieu à des monologues autour de la table, mais rien de concret dans la fiction). Et nous sommes tous (je crois) impatients de pouvoir nous plonger dans la suite ce soir. Si nous ne lui avions pas fait confiance, et dans beaucoup de groupes de jeu, il y aurait eu blocage, ou bouderie, ou discussion.

Faire confiance au joueur : lorsque le joueur prend le pas sur le meneur ou sur un autre joueur de manière spontanée, sans concertation, sans explication. Par exemple lorsqu'un joueur demande au MJ de faire un jet pour un de ses PNJ, ou étoffe spontanément son historique d'une manière qui va modifier la situation en cours. Cela me concerne surtout, les autres prennent moins souvent ce genre d'initiatives. Mais lorsque quelqu'un le fait, nous le suivons même si nous ne comprenons pas, en évitant d'interrompre le flux de la partie.

Sinon on peut en discuter

Lorsqu’on arrive aux limites de la confiance, quand on a l’impression que cela déconne vraiment, on discute. Pas de bouderie, de gueulante, juste une discussion « time-out » comme on dit par chez nous (càd OOC, méta-jeu, je ne sais pas si l’expression est répandue). Le 1er stade est en général un air particulièrement sceptique chez un des participants. Cela suffit en général pour faire comprendre qu’il y a un problème. À ce stade, nous avons une expression « c’est géré » ou « ne t’en fait pas, c’est géré » qui veut approximativement et informellement dire « fais moi encore un peu confiance, tu verras, et puis si tu es effectivement lésé nous corrigerons cela plus tard, maintenant n’interrompons pas plus le jeu, d’accord ? ».

Le 2nd stade est l’explication en fin de séance, si la situation peut attendre, ou l’explication immédiate si la situation est plus urgente.

Au final, nous n’avons jamais eu de problème réel de confiance, de conflits sur la manière dont nous jouions. Il est déjà arrivé que nous ne parvenions pas à accorder nos goûts et nos envies de jeu avec d’autres joueurs, mais pas de conflit aux autres niveaux.

Je ne pense pas là qu’il y ait quelque chose révolutionnaire, seulement un peu de maturité. (Je l’affirme tranquillement et en parfaite conscience des conduites immatures que j’ai eu dans le passé à cet égard.)


Dans le doute, lance un dé

Bien entendu, on ne lance pas un dé pour résoudre un problème de confiance. (Enfin, peut-être entre les personnages, un bon jet de baratin et hop !) (Bien que dans le passé, nous jetions un dé pour trancher rapidement lors des désaccords dans l’interprétation des règles, ce qui n’arrive plus depuis que nous avons un « gardien des règles » informel.)

Le dé va servir seulement à des moments choisis. Il faut que ce soit important pour quelqu’un. Peu importe la raison de l’importance.

Si c’est important, peu importe la probabilité de l’action, on peut jeter le dé. Dans le cas de l’action presque infaisable, pour tenter le coup de poker. Ou presque immanquable, pour tenter le diable. Dans le cas de l’action dont l’issue est incertaine, pour savoir de quelle côté penchera la balance. Dans le cas de l’action crue non-importante pour marquer que, pour soi, c’est important.

En général, il n’y a pas de « demande du jeter de dé ». Lancer ostensiblement le dé suffit généralement.

Et l’on lance le dé ainsi, par exemple, si l’on veut mettre en jeu une décision arbitraire. C’est en quelque sorte une clause rupture de confiance,[edit] ou en tous cas d'accord[/edit]. (Je rappelle que tout ces mécanismes sont informels, c’est une analyse personnelle.) Exemple :
Manu — Vous portez votre toast et puis il prends congé.… Que fais-tu ?
Ajax — Je vais allez voir si Barberine est toujours au parc.
Manu — Sur le chemin, tu as la tête lourde, tu ne te sens pas bien… Tu perds conscience.
Ajax — Le vin était drogué ?
Manu — Mmmh mmmmh (ce qui, en langage Manu, veut dire « oui »)
Ajax, lançant un d12 au milieu de la table — Je te rappelle qu’Anardil est herboriste… 12 [c’est un bon résultat, qui appelle à relancer le dé], 12 [idem], 10 [l’équivalent d’une réussite critique].
Manu — Au moment où tu porte le verre à tes lèvres, tu reconnais une odeur très légère, mais de mauvais augure. Un narcotique.


Le dé sert aussi aux joueurs indécis pour ne pas paralyser la partie, lorsque l’on se retrouve paralysé entre deux tendances d’un personnage. Souvent pour décider entre l’action risquée mais tentante et l’option raisonnable.

Oui, bon, ce n’est pas vraiment « dans le doute », n’est-ce-pas ? Mais la phrase sonnait si bien… Me voici forcé de revenir à la version précédente : « dans le doute, frappe encore » ;)


Est-ce plus clair ?
Dernière édition par Ajax le 20 Déc 2011, 19:47, édité 1 fois.
En plein questionnement, en pleine digestion, je décante.
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Re: [Présentation] Une histoire de famille

Message par Ajax » 20 Déc 2011, 19:44

Mon inconscient a donné un coup de coude à mon conscient pour lui signaler qu'il y avait (au moins) deux manières de lire l'exemple du vin empoisonné :
  1. Je signale à Manu qu'il a commis une erreur de maîtrise, qu'il a "mal" tenu compte des capacités de mon personnage.
  2. Je signale à Manu que je ne suis pas d'accord avec la direction qu'il veut prendre, essentiellement parce que ce n'est pas comme cela que je vois le personnage (qui n'est pas tombé de la dernière pluie et qui a connu de nombreuses autres situations du même genre), et je lui signale en même temps par quel biais je voudrais qu'il s'en sorte.

Dans le cas présent, si 1. est tout de même vrai à 30%, 2. est vrai à 100%.
En plein questionnement, en pleine digestion, je décante.
Ajax
 
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