Par rapport au fait que le MJ raconte son histoire, j'aimerais t'orienter vers un article :
http://ptgptb.free.fr/0027/th101-2.htmL'auteur M. J. Young parle de ce qu'on appelle "le truc impossible avant le petit dèj" : le MJ a le contrôle l'histoire et les joueurs sur les personnages principaux de cette histoire. Cette croyance fortement répandue ne tient pas et est à la source de la plupart des frustrations liées à la pratique elle-même. L'article donne des techniques permettant de s'en affranchir.
Les MJ compensent soit en pariant sur la "docilité" des joueurs, soit en leur faisant croire qu'ils sont libres alors qu'en fait pas du tout.
Problème : des joueurs qui veulent explorer leur liberté dans le premier cas risquent de foutre la partie en l'air.
Des joueurs qui ont découvert qu'ils ne sont pas libres dans une partie ont de fortes chances pour ne pas apprécier la partie en cours, voire être vigilants dans ses parties futures.
En outre, les jeux de rôle "classiques" (livres et pratiques) n'interdisent pas que le MJ prépare succinctement le scénar et laisse les joueurs faire ce qu'ils veulent, y compris inventer des éléments de décor, par exemple une chose vécue : des joueurs se rendant chez un de leurs PJ décident d'élaborer une tactique pour prévoir l'assaut des ennemis, ils se mettent à dessiner le plan de l'appart en question en le décrivant. Là en tant que MJ, je leur ai délégué la description d'une partie de l'univers.
Allons même plus loin : un joueur qui décrit son arme ou même ses vêtements prend déjà autorité sur quelque chose d'extérieur à son personnage. Au delà de la volonté du personnage joué, tout est concession. Certaines pratiques en offrent plus que d'autres, parfois tacites, parfois explicites.
Pour la question des limites des JDR "à forts espaces de créativité pour les joueurs" (ce que tu dois sans doute appeler "jeux narratifs"), il n'en est rien pour la simple et bonne raison que les créateurs de ces jeux proposent des méthodes de préparations de parties qui évitent le conflit avec la créativité des joueurs : voir le "scénar" d'Innommable : les révélations sont dénuées de conditions, ce qui évite que les joueurs ne fassent pas ce qui est attendu et foutent le MJ dans la merde. De même pour le monde, on ne décrit pas tout à l'avance de manière à offrir certains espaces de liberté aux joueurs.
Autre point important : le partage de la narration n'est jamais (ou presque) total. Ces libertés sont toujours cadrées de manière à ce qu'elles n'empiètent pas sur le rôle du ou des MJ, ni sur la préparation du monde ou du scénar. Par exemple : "le MJ a le contrôle absolu sur le monde", on ne laissera pas les joueurs le décrire librement. Si le MJ contrôle l'intrigue et pas le monde, les joueurs peuvent ajouter les descriptions qu'ils veulent sur le monde, mais ne pourront pas ajouter d'éléments d'intrigue. Etc.
Le seul risque, c'est que le jeu soit mal conçu.
Concernant la question du système, je ne parle pas du système tout entier, ni même des accessoires, je parle d'un système de simulation : "avec 12 en force, je peux soulever 30 kg à bout de bras", "si vous tombez d'une falaise, vous prenez autant de dégats que Constitution + hauteur de la chute x2" etc.
Les règles d'Innommable ne sont pas un système de simulation, on s'en fout de savoir combien de kilos on peut porter, ou de décrire à l'avance tout ce que sait faire ou pas un personnage.
Après que le jeu permette une pratique "simulative" si tu me permets l'expression, ça n'a rien à voir.
Les règles de simulation sont un héritage du wargame et gagnent à être dépassées.
Par contre il y toujours un système quand on joue au JDR, même au JDR sans règles : la manière dont on écrit le scénario et dont le MJ joue son rôle font partie intégrante du système, fût-il prévu à l'avance ou non.
Enfin, un exemple pour lequel la distinction JDR-jeu narratif ne tient pas, c'est ququ'entre les jeux les plus hardcores côté classique et les plus hardcore côté "narratifs" : rien de ce qu'on trouve dans l'un ne peut-être trouvé dans l'autre.