[Dust Devils] Le Sentier des Larmes

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[Dust Devils] Le Sentier des Larmes

Message par Christoph » 09 Nov 2008, 19:49

Hello

Dans la veine de la thématique récente des scénarios bacs à sable, je vais parler un peu d'une partie que je viens de jouer et qui correspond assez bien (dit-il fièrement) à cette technique. Voici ma préparation, telle que je l'ai imprimée et utilisée en partie. Les textes descriptifs sont tirés de Wikipedia tels quels, d'où le mélange d'anglais et de français. Ça vaut la peine de survoler ou de l'avoir sous les yeux pour suivre le rapport de partie, parce que malgré l'impression que je peux parfois donner, la préparation peut tout à fait être essentielle dans des jeux forgéens.


Comment je m'y suis pris pour préparer le bac

Je me suis préparé pour un scénario de convention. Je voulais créer une situation instable dans laquelle il y aurait un certain nombre de personnages, parmi lesquelles les trois joueurs pourraient choisir le leur, le reste étant des PNJ. Je voulais quelque chose de méchant (préférence esthétique personnelle), et je voulais tester Dust Devils depuis un moment déjà, ça tombait très bien.
J'ai eu un moment d'inspiration: il fallait qu'il y ait les thèmes des indigènes, de la femme, de la religion et de l'industrialisation.
J'ai parcouru Wikipedia et je suis tombé un peu par hasard sur l'épisode du déplacement des Cherokee. C'était dans le sud-est américain dans les années 1830, c'était pas trop anachronique d'introduire le chemin de fer. Il y avait clairement des missionnaires chrétiens.
Okay, il me faut une demi-douzaine de personnages... voyons:
Une femme Cherokee, qui pourrait croire en la cohabitation entre indigènes et européens. Un mec Cherokee un peu cinglé qui veut se venger des blancs. Un homme de foi, parce que les rôlistes aiment jouer des extrémistes religieux (pourquoi?) Un prospecteur pour une compagnie de chemin de fer... et pourquoi pas en faire une femme juive? Ah, il me faut un rôle délicat aussi: le fonctionnaire chargé par le gouvernement fédéral de traiter de la "question indienne". Et un paysan blanc qui a quelques différents avec les Cherokee quand à l'utilisation des terres et dont le domaine se trouve pile poil sur la ligne projetée du chemin de fer.
Je n'étoffe pas trop, comme ça les joueurs peuvent adapter certains aspects (déjà que ce sont des prétirés! et que j'ai un scénario! ça a bien fait rire Lionel quand il est venu voir à notre table...)
Bon, ça devrait tenir en 4-5 heures, y.c. explication des règles.


Comment les gens se sont assis dans le sable

Donc, je me retrouve à cette petite convention où nous allons régulièrement avec une bande d'amis. Lionel et moi avions déjà proposé de maîtriser l'année passée, alors on a retenté l'expérience.
Finalement, je n'ai eu que des connaissances à ma table! Mon frère Michael, Zarina (amie et membre du comité Orc'Idée) et son copain Jérôme (pas le même que celui dont vous pouvez lire les exploits dans la plupart de mes comptes rendus)... quelque part, tant mieux, car je sais que ce sont des gens raisonnables et avec qui on peut faire du JdR!

Michael a pris Sarah Blumenbrock, et l'a jouée telle quelle, en jouant sur le fait que c'était une femme en pantalon (gasp!) et à la tête d'une équipe d'ouvriers (impensable!)
Zarina a joué Wut-Teh aka Rosa Parks et a décidé qu'elle était veuve d'un mari blanc. Enfin, elle a carrément précipité son décès... ceci a été un point de détail crucial pour l'histoire de Wut-Teh.
Jérôme à joué Sean McNamus, prêtre catholique un peu trop avide de conversion.

On a joué une scène d'introduction pour chaque PJ, et j'en ai profité pour introduire un des PNJ majeurs à chaque fois: Burt Griffin le fermier qui pense que les blancs savent mieux utiliser les terres que les indiens, Tah-Chee le taré qui en a marre de la mentalité d'exploitation à outrance des blancs et Tom Threepersons, le fonctionnaire lâche et perfide.
Frédéric aurait potentiellement hurlé: je me suis abandonné à de l'interprétation de la plus pure espèce! Je faisais même des mimiques et des gestes, mais je n'ai pas trop abusé des accents (juste un peu).

Tout ça, c'est finalement assez classique.


Comment nous avons construit le château de sable

Il y a eu beaucoup de scènes où les persos se sont juste montrés. Ce que je veux dire par là, c'est qu'on a découvert qui ils étaient vraiment. Par exemple, le prêtre avait beau être un prosélyte, il n'avait pas oublié son amour du peuple Cherokee: il y a certes eu quelques conflits (notamment avec cet alcolo de Tah-Chee, et là c'était clairement prosélytiste), mais le vrai personnage s'est construit autour de cela et en interaction avec l'évolution de la situation. Difficile à épingler, mais j'en ferai peut-être un autre rapport à l'avenir.

Là, le système de Dust Devils était bien adapté. Les conflits signifient toujours qu'il y a un fond de violence: physique, verbale, pourquoi pas sociale (le racisme latent par exemple).
On les résout en tirant un certain nombre de cartes de poker (ça dépend de ce qui a écrit sur les feuilles de personnages), puis on essaie de faire la meilleure main. La meilleure main l'emporte et inflige des "dégâts" au caractéristiques de l'ennemi, mais c'est celui qui a la carte unique la plus haute qui raconte comment cela se concrétise dans la fiction.

Une fois qu'un personnage est arrivé à 0 dans une caractéristique et qu'il entre dans un conflit mettant cette caractéristique à contribution, il arrive à sa Fin. A ce moment-là, son joueur sera forcément narrateur et raconte comment son perso quitte l'histoire. Eventuellement il peut encore baisser ou monter les scores des autres persos.

Ceci a par exemple donné une superbe scène de fin pour Wut-Teh (qui avait une bonne position sociale chez les blancs en tant que Rosa Parks). Elle était constamment en conflit avec Tom Threepersons sur la "Question Indienne" et ils se sont mutuellement bien fait descendre leurs caractéristiques. A un moment, elle invite le maire (célibataire: par hasard! je l'avais décrit comme ça parce que je pensais que ce serait intéressant pour Blumenbrock) et commence à le cuisiner pour savoir quels sont les plans de la ville concernant l'Acte de Retrait des Indiens (qui a vraiment existé!) Il n'en parle pas trop, change de sujet. Donc elle le drogue et là... il parle!
Attendez, elle l'a drogué? Mais son mari... et là, tout s'emballe. Le maire se réveille complètement déchiré le lendemain en fin de matinée (alors qu'il devait travailler) et il déclenche une procédure pour arrêter Wut-Teh. Tom en profite pour lui inculquer encore le meurtre de son mari et elle n'a guère le choix que de fuir.
Finalement elle se fera rattraper et on la condamnera à la pendaison. Zarina en profite pour entrer dans la Fin de son personnage et raconte comment elle demande de voir une dernière fois le ciel étoilé à Tom. Celui ci se laisse aller à la lubie de cette folle peaux-rouge, de toute façon elle va bientôt crever et il sera tranquille. Elle l'assomme d'une pierre en pleine tempe et s'enfuit. Là elle croise McNamus le prêtre et Blumebrock et deux de ses hommes autour du cadavre de Tah-Chee avant de disparaître pour toujours.
Tout ça, c'est Zarina qui l'a racontée.

Entre temps, McNamus a beaucoup milité pour les Cherokee et a tenté de contrer la signature du traité de relocalisation. Jouant d'une mauvaise chance monumentale (on a toute de suite vu qui était le célibataire d'entre nous deux!) Jérôme perd conflit sur conflit avec les autorités blanches et n'arrive pas à convaincre le chef des Cherokee à dénoncer le contrat, malgré le soutien fort d'une bonne part de la population Cherokee.
Dégoûté (il était à 0 en Coeur à ce moment-là), il part à la recherche de ce Tah-Chee qui tire sur tout le monde dans la région (et qui lui avait accessoirement bousillé l'épaule faut-il le mentionner?) pour le dégommer.
Mais il le retrouve au même moment que Blumenbrock qui veut venger la mort d'un de ses hommes. Le Cherokee ivre est donc cuit.
Sean McNamus abaisse son arme, renonçant de tirer sur cette pauvre épave dont la vie a été ruinée par les blancs. Blumenbrock et ses hommes le fusillent.
Peu après, Wut-Teh débarque et explique en quelques mots à McNamus qu'elle doit partir et qu'elle lui faisait confiance pour aider les Cherokee à lutter contre la relocalisation (ceci pour illustrer le fait que Zarina remonte le score de Coeur du prêtre de 0 à 1, ce qui n'est possible que lorsqu'un personnage est à la Fin). Cette confiance réchauffe le coeur de McNamus. Qui bénit quand même le cadavre... (genre, j'aide les indiens, mais ce serait quand même bien qu'ils aient la même religion que moi alors je leur donne un petit coup de main...)

Blumenbrock était assez passive au début, mais à la fin, la situation lui a pété un peu à la tronche, dans le sens où les fermiers ne pouvaient pas la sentir (menace pour leurs terres!) et que Tom les a poussé à bout en espérant un acte stupide qui lui permettrait de faire exproprier les fermiers en plus des Cherokee, parce que lui aussi croyait au chemin de fer. Et il espérait ainsi que Blumenbrock devienne également alliée pour la Question Indienne.
Elle essaie donc de gérer la question des fermiers blancs (qui du coup se sont retrouvés en alliance contre-nature avec les Cherokee) et... grâce à un carré d'As (!), Sarah Blumebrock et ses hommes se font tabasser propre en ordre, en signe "d'avertissement". Elle était accusée d'avoir fait brûler la ferme de Burt Griffin (alors qu'en fait c'est Threepersons qui a fait faire cela pour polariser la situation entre paysans et la prospectrice).
Finalement, les blancs trouvent un terrain d'entente: ils vont profiter du fait que le chef Cherokee ait signé le papier pour redistribuer ces terres aux fermiers (au double!) et ainsi pouvoir construire le chemin de fer comme prévu. Tout est bien qui fini bien, non?

Tragiquement, c'est à peu près comme ça que ça a du se passer historiquement aussi. Ce qui est sûr, c'est que sur le Sentier des Larmes, les 15'000 Cherokee en déplacement pour l'Ouest ont perdu 4'000 des leurs.


Liberté des joueurs

J'ai un peu bâclé l'aspect "qui dit quoi", certes. Ce qu'il faut voir, à mon avis, c'est que les joueurs étaient libres de prendre position comme ils l'entendaient, mais qu'il y avait bien entendu certaines positions qui étaient bien plus crédibles que d'autres (Wut-Teh n'allait certainement pas féliciter Tom Threepersons).
Ensuite, ils pouvaient démarrer des conflits au sujet de ce qu'ils voulaient (mais moi aussi en tant que MJ) et les règles garantissaient que les buts des vainqueurs soient respectés, peu importe qui racontait l'issue du conflit.
Maintenant, un exemple de la question du partage entre MJ et joueurs:
Zarina a choisi de se coucher sur un conflit en voyant ses cartes pourries. Cela signifie qu'un événement venait interrompre momentanément la résolution du conflit dans la fiction. Ainsi, il s'agissait d'aller fouiller sa demeure pour trouver les fioles de drogue et de poison qu'elle était supposée avoir, comme preuve de ses actes perfides. Donc Zarina se couche et raconte comment Burt Griffins ramène sa viande en hurlant qu'il y avait le feu à sa ferme!
Malgré cela, c'est moi qui décidait qui avait foutu le feu à la ferme. Si elle avait immédiatement proposé une réponse, j'aurais eu le droit de lui dire non, ou de révéler que c'était une fausse information plus tard. Parce qu'en tant que MJ, je garde l'autorité sur le monde et son contenu. Les joueurs eux vont le faire bouger via leurs personnages, mais cela ne leur donne pas le droit d'affirmer des faits sur les PNJ, événements, etc. Suggestions que je suis libre d'accepter: volontiers! Affirmations: exclus!
Finalement, c'est assez classique tout ça. On garantit juste un poids considérable aux volontés des joueurs prêts à entrer en conflit (et donc de risquer leurs persos).

Suis-je dirigiste?
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Message par Frédéric » 09 Nov 2008, 21:47

Si je puis me permettre, voici un essai de schémas qui nous aidera peut-être à discuter de cette question de dirigisme :

Image

Si tu juges que ça peut nuire à la discussion, je l'enlève de suite.

Pour explication :
Chaque forme représente l'évolution potentielle d'une partie, en fonction des choix des différents intervenants.

Au départ, nous avons la situation initiale et la création des personnages-joueurs. Si la création des PJ a une influence réelle sur "ce qui va se passer", alors au lieu d'un point de départ, on a une barre, car la situation initiale pourra être différente selon les personnages créés.
La forme en elle-même représente le champ d'évolution potentielle à partir de cette situation initiale.

L'arrivée est l'ouverture possible ou non de la fin de la partie.

J'ai l'impression que la partie que tu nous décrit s'apparente à un cône : une situation initiale figée, mais qui peut partir dans toutes les directions restant orientées sur le sujet de la partie (comment pourrait-il en être autrement sans tomber dans la négation de ce que tu proposes au départ).


Je tiens à préciser que ces schémas ne se veulent pas exhaustifs, mais seulement une tentative d'indexation des possibilités rôlistiques concernant le dirigisme et la liberté des joueurs.
Aussi, aucun d'entre eux n'est meilleur que les autres dans l'absolu, ils me semble qu'ils doivent simplement être adaptés à la proposition globale du jeu.

Par exemple dans le cas du faisceau, la partie est canalisée, assez peu élastique, il y a donc des chances pour que plus le faisceau sera large, plus la partie sera intéressante.

Le chapelet peut très bien convenir à un jeu à épreuves, où toutes les épreuves sont prévues à l'avance et où ce sera la façon de les résoudre qui prévaudra.

Enfin, la partie décrite par Marc :
Fiction non scénarisée s'apparenterait selon moi à une arène. Ceci fonctionne certainement mieux avec de bons stimuli pour la créativité de chacun

Donc le terme dirigisme est en soi un peu difficile à trancher, puisque l'absence de participation des joueurs à l'histoire du jeu peut rester très fonctionnelle si d'autres espaces de créativité et de liberté existent dans la partie. Il va par contre falloir les rendre vraiment attrayants.

Pour moi, tu n'es pas du tout dirigiste. Tu donnes une impulsion, certes, mais tu offres aux joueurs un espace de créativité qui me semble assez important car leurs choix et les conséquences qui en découlent forgent l'évolution de l'histoire.

Edit : mise à jour du schéma.
Dernière édition par Frédéric le 18 Jan 2009, 16:49, édité 1 fois.
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Message par Frédéric » 10 Nov 2008, 01:24

Pour expliciter davantage ces schémas, je vais ajouter une petite légende :

Ces schémas sont là pour tenter de réfléchir sur les différentes possibilités d'imbrication entre ce qui est prévu avant la partie et les décisions prises pendant la partie, avec une focalisation de ce point de vue là sur les décisions des joueurs.

Les points et les lignes droites désignent une absence d'élasticité, c'est à dire que les libertés des joueurs sont restreintes dans un champ balisé. Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas de libertés (pour schématiser, les choix tactiques dans un combat de D&D sont des libertés, mais elles entrent dans un canevas de possibilités balisé).

Les barres et les lignes courbes désignent une élasticité, ce qui signifie que les propositions (surtout celles des joueurs) peuvent faire des circonvolutions, tester les limites du "bac à sable" et favoriser les situations ou évolutions de situations inattendues par l'ensemble du groupe, MJ éventuel compris.

Le rapport de Lionel sur Agone serait soit un cône soit une semi-arène du fait que la liberté qu'ont les joueurs semblent grandes, dans un bac à sable où ils ont des indices et des orientations prévues à l'avance, mais visiblement secondaires...
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Message par edophoenix » 10 Nov 2008, 01:59

Le système tel que tu le décris se prête bien à ce genre de parties, je trouve, en particulier lorsqu'un joueur raconte lui-même la Fin de son personnage ; c'est très libre finalement. Tu donnes l'impression - je ne sais pas si c'est juste - que les joueurs participent beaucoup à la narration par rapport aux cartes qu'ils ont, et qu'ils participent beaucoup à l'interprétation des résultats, alors je ne vois pas trop où est le dirigisme ( je suis sans doute passé à coté, comme d'habitude ! Pourtant, là, j'ai bien tout lu. ).
"Le Paradis, c'est un roman devant un bon feu ! " - Théophile GAUTHIER.
"Toute notre dignité consiste donc en la pensée " - B. PASCAL, Pensées.
"Si le monde n'a absolument aucun sens, qu'est-ce qui nous empêche d'en inventer un?" - Lewis Caroll, Alice au pays des Merveilles.
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La ludologie, c'est bon, mangez-en !
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Message par Marc » 10 Nov 2008, 12:59

Si je peux me permettre, je pense que le dirigisme est toujours au même endroit : dans la "crédibilité" et "l'impensable" que tu évoques, mais également dans la situation de départ, que tu fixes (personnages prétirés avec des buts contradictoires), et avec justement cette histoire de suggestion que tu es libre d'accepter ou de refuser, là où les joueurs sont obligés d'accepter les dires des autres.

En fait, je n'avais pas envisagé le scénario "bac à sable" comme ça, mais c'est bien aussi ! =D D'ailleurs il faudra que je teste ça un jour.

Le système laisse effectivement une grande liberté aux joueurs, qui leur permet de s'emparer de la partie "interprétation des évènements", bien qu'on constate que ça vient parfois en opposition avec la crédibilité, justement.

Les schémas présentés par Fred sont intéressants et assez bien vus (bien qu'il manque à mon avis le "chapelet avec fin décrite").

PS : je ne vois pas le problème avec l'interprétation, c'est souvent un bon moment :-°
Marc
 
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Message par Lionel (Nonène) » 10 Nov 2008, 14:01

Je n'ai pas le temps de réagir tout de suite mais j'ai une question :
Où as-tu trouvé ce schéma ? Il est intéressant mais j'aimerais connaître son origine.
Lionel (Nonène)
 
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Message par Frédéric » 10 Nov 2008, 14:15

Je l'ai dessiné hier, l'idée s'était esquissée il y a longtemps par rapport à un projet personnel de "jeu vidéo" (projet de diplôme)... et cet article dresse une liste d'options qui m'a servi de référence.
Frédéric
 
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Message par Christoph » 11 Nov 2008, 03:38

Merci Frédéric pour ces schémas! Je vais réfléchir à cela les prochains jours, en attendant, pour la forme, je dirais que cette partie avait une petite barre au début (exemple: Wut-Teh n'était pas obligé d'avoir tué son mari, pourtant c'était très important pour la partie, mais en même temps, il devait y avoir Wut-Teh), était pas mal flexible au milieu et, surprise (enfin, on en a déjà parlé les deux), se resserre un peu à la fin, puisque il y a clairement un moment où des gens vont se foutre sur la tronche et que les véritables fins ne doivent pas être si nombreuses que cela. Threepersons ne peut réussir qu'au détriment des Cherokee, les deux ne sont pas conciliables. Je ne pense pas que ce soit grave, parce que le protagonisme est conservé (voir plus bas).

Edouard, tu as vu juste pour le système. Beaucoup de choses sont apportées par les buts des personnages dans les conflits et la narration des issues, et les joueurs peuvent effectivement saisir cette occasion pour s'octroyer des pouvoirs momentanés de MJ si on veut.

Pas tout à fait MJ, car en tant que MJ, on garde l'autorité sur la préparation et les pourquoi-du-comment des PNJ. Les joueurs eux ont l'autorité sur leurs personnages.

Marc, est-ce que les joueurs sont dirigistes parce qu'ils jouent leurs persos et que je n'ai rien à dire? Je ne crois pas. Certes, le MJ a les PNJ et le monde à sa disposition, donc ça fait plus de choses sur lesquelles il est dirigiste... mais si on lit le rapport de partie, je crois qu'on voit bien qu'il y a en fait une seule chose que le MJ gère vraiment: l'adversité. C'est pour cela que je récupère l'incendie pour moi. Une joueuse peut jouer l'adversité pour un autre PJ, mais uniquement par les actes de son perso.

Note technique: si Zarina avait gagné le droit de Narrateur dans un conflit où des gens s'engueulaient devant la ferme de Burt, là elle aurait pu raconter comment suite à une baston, un des personnages (pas forcément le sien!) finit par mettre le feu à la ferme. Mais Zarina s'était couchée car sa main était trop mauvaise, elle ne devait donc que raconter une interruption et encore, c'était peut-être à moi de le faire, les règles ne sont pas ultra claires sur ce point précis.

Si je reprends les deux catégories de techniques que j'ai présentées sur ton fil Star Wars, en aucun moment je ne prive les gens du type 1: positionnement du personnage (le leur donc). Sauf s'ils entrent dans un conflit, là ils prennent un risque, et le savent. Pourtant, ça reste assez sympa même s'ils n'ont pas les droits de Narrateur pour l'issue d'un conflit, leurs buts doivent être respectés en cas de victoire et en aucun cas un autre joueur peut-il donner des descriptions portant sur les pensées et les motivations des personnages autre que le sien.

Ces techniques de type 1 soutiennent le "protagonisme" évoqué en début de post: la possibilité qu'a un joueur de faire de son personnage un protagoniste dans l'histoire qui se crée. (Finalement, ce n'est rien d'autre que de la théorie forgéenne réchauffée dans mon micro-onde, si ça intéresse des gens à creuser plus, faites une recherche sur Protagonism et Paul Czege.)

Les techniques de type 2 sont ensuite tout ce qui vient donner sens au protagonisme: le contexte (ce qui inclut les personnages "pivots" qui forcent les protagonistes à se bouger le cul) et l'antagonisme essentiellement.

Petit aparté: notez que les fameuses questions "d'ambiance" si chère à tant de rôlistes n'apparaissent pas dans mon découpage. Ce n'est pas au MJ seul de gérer l'ambiance, ça peut très bien être partagé et c'est remarquable de voir à quel point un personnage qui est véritablement un protagoniste joué par un joueur qui a le droit de le mettre en scène comme il l'entend apporte à l'ambiance.
A comparer avec les parties où c'est toujours le MJ qui narre les effets des actions. La plupart des PJ finissent par paraître bien pathétiques. "Ah, tu loupes... euh, ta dague se plante dans le mur plutôt que le méchant. Suivant..." "Mais comment je peux louper un mec à 30cm? A la rigueur qu'il parvienne à se défendre je veux bien, mais poignarder un mur, c'est naze." (Je ne dis pas que ce n'est pas réaliste, je dis que c'est naze.)

Voilà mon délire est terminé, il me reste une question à poser à Marc: où est-ce que tu constates dans ce rapport de partie que la partie interprétation des événements (et encore, je précise qu'il s'agit plutôt de la description des résultats d'un conflit) vient parfois en opposition avec la crédibilité quand un joueur s'en empare (plutôt que le MJ?)
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Message par Marc » 11 Nov 2008, 14:11

Bon, c'est peut-être une question de définition, mais à mon sens, le dirigisme, c'est limiter les choix des autres. Dans ce sens, non, les joueurs ne sont pas dirigistes en jouant leurs persos, mais ils peuvent l'être en imposant d'autres évènements (typiquement, l'incendie).

Sinon je suis d'accord : la majeure partie du temps, le MJ ne gère que l'adversité. Mais il est fait état à plusieurs endroits de "crédibilité", je cite :

- "Michael a pris Sarah Blumenbrock, et l'a jouée telle quelle, en jouant sur le fait que c'était une femme en pantalon (gasp !) et à la tête d'une équipe d'ouvriers (impensable !)."

- "certaines positions étaient bien plus crédibles que d'autres (Wu-Teh n'allait certainement pas féliciter Tomb Threepersons".

Je me trompe peut-être, mais ça ressemble à des limites. Je n'ai pas l'impression que le groupe les ait atteintes pendant la partie, mais ça ne les empêche pas d'exister. Non ?
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Message par Frédéric » 11 Nov 2008, 14:49

Oui, on en arrive à une question de définition du dirigisme...

Le problème avec ta définition, Marc, c'est qu'elle englobe la totalité de l'activité rôlistique : si l'on décide de jouer à Vampire ou à Pendragon, on limite déjà le champ exploratoire de la partie à un univers et à des catégories de personnages.

Dust Devils, c'est du far west, c'est déjà une limitation du choix des joueurs.
Dans mes schémas, il y a toujours une limitation, y compris dans l'arène où la barre de départ ne peut être extensible à l'infini, car il faut se mettre d'accord sur un parti pris de départ qui est forcément limitatif.
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Message par Marc » 11 Nov 2008, 15:10

Personnellement je fais la différence entre décider (de façon unilatérale, et sans contestation possible d'autre part) et se mettre d'accord.

Mais je suis preneur d'autres définitions.
Marc
 
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Message par Christoph » 11 Nov 2008, 15:21

Hello Marc

Si tu penses que limiter le choix des autres est dirigiste alors proposer une attaque contre un PJ, c'est ôter le choix à son joueur de jouer un personnage qui n'est pas attaqué. Pourtant, personne ne qualifierait cela de dirigiste. Bien au contraire, ça ajoute quelque chose à la partie.
Je pousse à l'absurde, mais c'est vraiment ça qu'il s'agit de voir: la question du dirigisme n'est pas tant une question de liberté dans l'absolu, plutôt qu'une ingérence d'une personne dans le domaine appartenant à une autre. Ainsi, si j'ôte la possibilité au joueur de réagir face à cette attaque comme il l'entend ("Tu les attaques!" "Non, je voulais fuire!"), alors je le "déprotagonise" (pour continuer dans ce joyeux jargon) et là il ne restera plus grand chose au joueur.

Frédéric, il faudrait voir exactement ce que tes schémas définissent comme champ de liberté. Je ne suis pas encore convaincu qu'on parle de la liberté fondamentale du joueur. On serait plutôt en train de parler d'une conséquence et des circonstances de cette expression de liberté.


Marc, pour ce qui concerne la crédibilité:

Blumenbrock était une femme émancipée, ce qui pouvait choquer à l'époque. Mes commentaires entre parenthèses sont sensé illustrer ce choc du point de vue d'une personne de l'époque, ironiquement bien sûr. Il ne s'agit pas d'une critique vis à vis de la crédibilité du personnage tel que joué par Michael.

Certaines choses ne sont en général pas crédibles: seuls quelques cheminements bien précis et remarquables pouvaient amener Wut-Teh, l'idéaliste de la cohabitation à en venir à admirer le plan de relocalisation de Threepersons (qui est une arnaque évidente). Notre partie n'a pas exploré cette très mince possibilité.
J'affirme prétentieusement qu'aucun joueur ayant la moindre once de respect pour son propre personnage et l'histoire en cours de création n'aurait sacrifié la crédibilité de son personnage, car cela aurait détruit le protagonisme que ce joueur exerce. Je n'ai pas du, en tant que MJ, intervenir pour rétablir la crédibilité, les joueurs étaient bien assez soucieux de jouer des personnages crédibles.
Dans cette optique-là, dire que c'est limitatif parce qu'on tente de respecter une crédibilité du personnage, c'est oublier de quelles libertés on parle. La liberté n'est pas celle de faire n'importe quoi.

Ceci dit, je vois poindre un sujet sous-jacent à tes questions: la différence entre du jeu "personne ne sera blessé" (sans connotation péjorative) et du jeu "je ne t'abandonnerai pas (malgré le fait que tu vas en prendre plein la tronche)". Je parle des vrais gens qui jouent, pas de leurs persos! Dust Devils tend clairement du côté rude de cette question, mais n'a rien de dirigiste pour autant.
En attendant que je trouve un bon rapport de partie pour illustrer cela, je te conseille de lire ce petit billet écrit par l'épouse de Vincent Baker, Meguey.

Dis-moi si cet aspect fait effectivement partie de tes interrogations et on pourra peut-être déblayer un peu plus de terrain encore.
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Message par Frédéric » 11 Nov 2008, 15:26

Pour ma part, je suis prêt à discuter de mes schémas autant que tu le veux, si ça sort de ce sujet, on peut le faire ailleurs. Ton analyse me semble pertinente.
Frédéric
 
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Message par Marc » 11 Nov 2008, 16:01

Bon, je dois mal m'exprimer, ou avoir un esprit particulièrement mal tourné, parce que j'ai la nette impression de ne pas arriver à faire passer ce que je veux dire.

Ou alors, c'est que je dis est complètement débile :-k

Ceci dit, ta réponse est pertinente, et c'est comme ça que j'aurais dû m'exprimer : le dirigisme, c'est l'ingérence d'une personne dans un domaine qui a été défini comme géré par une autre.

Proposer une atttaque au PJ, c'est du dirigisme si le PJ est sensé avoir un contrôle absolu sur son personnage et ce qui lui arrive (dans le cadre d'un partage de narration, par exemple). Ca n'en est pas dans le cadre d'une partie où chaque joueur ne contrôle que les actes de son personnage (et je ne parle pas des jeux avec des règles de psychologie, qui mettent en place sans l'avouer que le joueur n'a en fait le contrôle que des actes "conscients" du personnage).

Pour la crédibilité, au temps pour moi pour Blumenbrock, je ne l'avais pas pris dans ce sens.

Le billet est fort intéressant, mais je vais avoir besoin de le relire et de l'assimiler pour voir s'il correspond avec ce que je veux dire, parce qu'il ne s'agit pas tant de la façon dont les joueurs interagissent, que du rapport entre les personnages gérés par les joueurs et la présence d'un univers de jeu géré par le MJ.

Ce n'est pas en soi limitatif de respecter une crédibilité du personnage, mais je m'intéresse énormément (toutes mes expériences médiocres en matière de jdr étant liées à ça) à la façon de gérer deux points de vue sur la crédibilité d'un personnage (typiquement celui du meneur et celui du joueur), et les frictions qui peuvent en découler. Ca n'est peut-être pas le bon sujet pour ça, par contre.
Marc
 
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Message par Christoph » 11 Nov 2008, 16:14

Frédéric, je ne sais pas comment continuer la discussion des schémas. Peut-être que ça vaut la peine que tu ouvres un sujet rien que pour cela, en faisant un survol de plusieurs parties et comment elles illustrent différentes "formes" de liberté. Ainsi, toi qui est le plus dedans tu as le contrôle de comment lancer et guider la discussion, je pense que ça peut être bénéfique maintenant que l'idée à été présentée.

Marc, okay, ne t'en fais pas, si ça se trouve c'est moi qui ne te comprends pas très bien. Le principal est que nous avons d'une manière ou d'une autre défriché pas mal de terrain et que cela peut, je l'espère, servir de terreau fertile pour de prochains threads. En particulier, si tu veux exposer plus en détail le sujet de la gestion de deux points de vue sur la crédibilité d'un personnage, je pense que ça vaut la peine que tu ouvres ton propre sujet un de ces quatre pour que tu puisses nous expliquer avec tes mots et ton expérience ce que tu entends.
Christoph
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