Hello
Très intéressant travail! J'ai trouvé très utile la remarque sur la souffrance du personnage. J'essayais depuis quelques temps à mettre le doigt dessus, sans vraiment y arriver.
Ceci me permet d'aborder un sujet peut-être tangentiel, mais qui me semble guetter en périphérie de ce texte. J'aimerais donc examiner avec toi le lien entre souffrance du personnage et succès du joueur.
Je pense que tu es déjà au courant de la chose d'une manière ou d'une autre, mais il me semble que ton post n'aborde pas franchement la chose.
Quand tu dis en introduction aux clefs que "que tant que l'issue ne convient pas à l'un des joueurs, on peut relancer les enjeux en prenant le soin de compliquer l'affaire à chaque fois", j'ai l'impression que le texte me dit que les joueurs peuvent obtenir ce qu'ils veulent. Bien sûr, ceci est faux, d'autant plus que si ton système corse les choses à chaque tentative, le personnage (et donc le joueur qui tente de le faire réussir), est parti pour une grosse claque.
C'est important que ceci soit possible, pour les raisons que tu évoquais en regard de la souffrance du personnage.
Je pense même que ceci peut faire mal au(x) joueur(s), comme on peut avoir mal en regardant un film. Même plus, car on s'investit dans le jeu de rôle en tant que personne et créateur.
Le jeu de rôle ne peut pas et ne doit pas garantir le confort du succès du joueur à mon avis. C'est une chose qu'il m'est extrêmement difficile à accepter, mais le jeu de rôle ne permet pas un contrôle total de la création. Il y aura toujours des choses qui échapperont au joueur et au MJ (suite aux actions des autres joueurs ou d'un fonctionnement du système), et il faut apprendre à ne pas s'accrocher vainement, mais plutôt accepter et continuer sur la lancée (il faudrait que je fasse un rapport de partie sur cela...)
Pour faciliter cette acceptation, il y a des techniques qui aident le joueur. En effet, ce qui me semble important dans le fond, ce n'est pas d'obtenir ce que l'on veut, mais de garantir la crédibilité de sa création.
Une technique qui non seulement donnerait tort au couple personnage-joueur, mais en plus tournerait en ridicule tout ce que le personnage représente et que le joueur soutient (même si c'est un pur rôle de composition) serait clairement destructive.
En revanche, une technique qui permet de certes concéder un échec, mais de garder la crédibilité intacte, renforce le récit à un très haut point. Une solution assez simple est de laisser le joueur raconter la défaite de son personnage par exemple (il fera en sorte de le faire en accord avec sa vision du personnage).
D'autres techniques sont certainement possibles, mais comme on touche à quelque chose qui peut être éprouvant personnellement si on va loin, il faut avoir une vision claire de ce qu'on veut.
Meguey Baker (l'épouse de Vincent), parle de deux pôles dans ces approches: "Je ne t'abandonnerai pas" et "Personne ne sera blessé" (traductions approximatives), qui désigne comment les joueurs se positionnent dans cette fragilité de la création.
Selon l'approche, on pourra adopter des techniques qui poussent les joueurs plus ou moins loin dans les zones délicates. Je suppose que la question est particulièrement importante pour les groupes où l'identification au (ou l'empathie pour) personnage peut être très forte.
Parce que le côté "caché" des systèmes comme DitV où l'on peut grandement pousser dans le sens qu'on veut, c'est qu'on peut aussi sacrément se casser la gueule (dans un sens qui peut être bénéfique, comme dans les autres formes d'expression).
En fait, on peut même aller plus loin que la question de l'échec. C'est dans le fond tout simplement une question de sujets abordés et ceci d'une certaine manière. C'est juste que le cas de l'échec du personnage est peut-être le cas le plus évident où un joueur peut se voir imposer qqch de pénible.
J'aurai ensuite quelques réflexions-questions plus directement en rapport avec ton texte, mais je préfère d'abord synchroniser nos horloges (on peut si nécessaire scinder, vu que je suis parti dans un sujet très tangentiel).